Burkina Faso: Le coup d’Etat militaire menace la stabilité et les droits humains

Le nouveau chef militaire Ibrahim Traoré escorté par des militaires, Ouagadougou, Burkina Faso, 2 octobre 2022. Photo : Vincent Bado/Reuters

La deuxième prise du pouvoir par des militaires au Burkina Faso en moins d’un an fait craindre une montée des violations des droits humains, particulièrement du droit à la liberté d’expression, dans un climat particulièrement instable, en raison du conflit entre les groupes armés islamistes et l’armée. Alors que l’avenir de la démocratie dans le pays semble de plus en plus hypothétique, ARTICLE 19 invite tous les acteurs nationaux et internationaux, y compris l’Union Africaine et la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), à accompagner le Burkina Faso sur la voie de la stabilité en encourageant le respect des normes internationales en matière de droits humains et la protection des droits individuels et collectifs. 

Le vendredi 30 septembre 2022, des coups de feu ont retenti à Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso. Des soldats lourdement armés ont pris d’assaut les édifices gouvernementaux, prenant le contrôle des zones stratégiques ainsi que le signal de la télévision nationale. Un groupe de soldats a pu annoncer à la télévision publique la destitution de l’ancien chef de la junte, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, par les autorités militaires. Après avoir refusé dans un premier temps de céder le pouvoir, le Président Damiba a présenté sa démission le dimanche 02 octobre, laissant ainsi la place au capitaine Ibrahim Traoré comme nouveau leader du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) et président du pays.  

“Le règne militaire ne saurait être une solution durable pour garantir les besoins et les droits fondamentaux de la population du Burkina Faso, notamment la sécurité et un niveau de vie adéquat, y compris une sécurité alimentaire adaptée. Des solutions immédiates doivent être trouvées à la recrudescence du pouvoir militaire dans la région de l’Afrique de l’Ouest. Le nouveau gouvernement militaire doit s’assurer que les droits humains fondamentaux y compris la liberté d’expression, sont promus et respectés et que les engagements pris avec la CEDEAO pour un retour à un régime civil dans les deux ans sont respectés.” a déclaré David Diaz Joelix, Directeur des Programmes Sénior d’ARTICLE 19.

Contexte

Le Président lieutenant-colonel Damiba est arrivé au pouvoir lors d’un putsch à la fin du mois de janvier 2022, entraînant également la formation du MPSR, dont il était le chef avant son éviction. Au cours des huit derniers mois, le MPSR a été critiqué par les citoyens et les organisations de la société civile pour ne pas avoir tenu les promesses faites au peuple burkinabé, notamment une stabilité relative et la jouissance des libertés démocratiques et pour avoir échoué à répondre de manière adéquate à la menace djihadiste. Jusqu’aux événements de ces derniers jours, le Capitaine Traoré, âgé de 34 ans, était le chef de l’unité Cobra des forces spéciales anti-jihadistes.

Avec les deux coups d’État au Mali en août 2020 et mai 2021 et celui en Guinée en septembre 2021, il s’agit du cinquième coup d’État en Afrique de l’Ouest depuis 2020.

Les tensions demeurent dans la capitale. Des manifestants ont attaqué des monuments français, notamment l’Ambassade de la France au cours du week-end, ce qui a incité le capitaine Ibrahim Traoré, leader autoproclamé et nouvellement installé, à appeler à la cessation des attaques contre les symboles et des violences. 

L’Organisation des Nations Unies (ONU), l’Union Africaine (UA), la CEDEAO et l’Union Européenne ont toutes dénoncé la prise de pouvoir par l’armée , déclarant que le coup d’État « sape les efforts entrepris depuis plusieurs mois ».

Le respect des droits humains et des libertés fondamentales et le principe de la tenue d’élections périodiques et équitables au suffrage universel font partie des éléments fondamentaux de la démocratie. Ces valeurs sont inscrites dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et développées dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le Burkina Faso devrait, conformément à ces obligations internationales, défendre et respecter ces valeurs fondamentales.

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Maateuw Mbaye, Assistant de programme, ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest Email : maateuwmbaye@article19.org  T : +221785958337

Aissata Diallo Dieng, Gestionnaire de bureau, ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest Email : senegal@article19.org  T:+221338690322