
Du 15 au 16 janvier 2025, ARTICLE 19 Sénégal / Afrique de l’Ouest, en consortium l’institut Panos Afrique de l’Ouest (IPAO) et Avocat Sans Frontière Mali (ASF-Mali), avec le soutien financier de l’Union européenne a outillé les Magistrats, Avocats, journalistes, Défenseurs des droits humains, activistes et bloggeurs sur la liberté d’expression, la protection des journalistes, l’accès à la justice. Cette formation qui entre dans le cadre du projet : « Renforcer l’espace civique et promouvoir les Humais (ECDH) », a mis l’accent sur les mécanismes internationaux, régionaux et nationaux de protection des droits de l’hommes. Elle a été l’occasion de discuter du cadre légal au Mali quant à la protection de l’espace civique et la protection, la sécurité des journalistes ainsi que des règles applicables aux infractions liées aux libertés civiques dont les délits de presse et d’opinion.
Partant du constat que le Mali depuis les élections législatives du 29 mars et du 19 avril 2020, contestées par l’opposition et par la prise du pouvoir par les militaires est dans une situation de transition démocratique. Dans ce contexte, les droits humains sont menacés, le rétrécissement de l’espace civique et les violations aux droits fondamentaux notamment la liberté d’expression, de presse et d’accès à l’information sont récurrentes (interdictions de manifestations, des coupures de signal des médias, des retraits de licence, des coupures d’internet, des arrestations, condamnations de journalistes, d’homme politiques continuent de poser des défis majeurs). Ce d’autant plus que le Mali fait face à une instabilité criarde dans une partie de son territoire.
Entre Novembre et décembre 2024, ARTICLE 19 a répertorié plusieurs cas de atteintes des droits humains notamment l’affaire de JOLIBA TV , la condamnation d’Étienne Fakaba Sissoko par la Cour d’appel de BAMAKO pour atteinte au crédit de l’État et diffusion de fausses nouvelles, suite à ses opinions et l’enlèvement de l’Imam Amadou Hady TALL.
En présence de Maitre Seydou DOUMBIA, Président Avocats Sans Frontières Mali, du représentant de la maison de la presse, M. Mahamadou T MAIGA et du Premier Conseiller chef de la coopération de l’Ambassade de l’Union Européenne, M. Michel DE KNOOP, Mme Astou DIOUF chargée de projet ARTICLE 19 Sénégal /Afrique de l’Ouest a introduit l’atelier avec une première session sur les libertés civiques en particulier la liberté d’expression. Elle a relevé les normes internationales, régionales et nationales pertinentes en la matière (DUDH, PIDCP, CADHP, la Constitution malienne etc.). Dans la même dynamique, elle a fait état du mécanisme de l’Examen Périodique Universel (EPU).C’est un mécanisme unique créé en 2006 par les Nations Unies afin d’obtenir une vision globale de la situation des droits de l’Homme dans chacun des États. La deuxième session sur la protection et la sécurité des journalistes a été co- animée par Dr. SYLLA SOW, Maître de conférences titulaire UCAD/FSJP – Chercheur Associé ARTICLE 19/ Afrique de l’Ouest et M. Mahamadou T MAIGA de la maison de la presse. Ces présentations ont été l’occasion de revenir sur le cadre normatif et institutionnel de protection du journaliste et du secteur de l’information (la Haute Autorité de la Communication (HAC), le Comité National de l’Egal Accès aux Médias de l’Etat (CNEAME) et la maison de la presse). Elles ont été surtout le moment de discussions des difficultés auxquels font face les journalistes, notamment les problèmes liés à l’obtention de la carte de presse et surtout l’émergence de nouveaux acteurs dont le statut n’est pas en pris en compte par le droit malien.
Selon M. MAIGA, : Au Mali, il y a moins de 1000 journalistes détenteurs de la carte de presse. Ce qui pose un problème de professionnalisme. Beaucoup sont venus avec d’autres diplômes et se sont par la suite adapter au métier de journaliste. La carte de presse continue d’être gérer de façon administrative, d’où la lenteur dans sa distribution.
Aux regards des risques du métier, le journaliste a besoin d’une protection plus consistante. Pour ce faire, la sécurité physique, la sécurité sociale et la sécurité psychologique sont visés. Il faut également une loi spécifique qui va permettre au journaliste d’avoir un accès rapide à l’information. Pour rappel, le Mali a constitutionnalisé le droit d’accès à l’information dans sa Constitution 22 juillet 2023.
En parallèle, Dr. Sylla a présenté la protection des journalistes au regard de la Déclaration de Windhoek (1991) qui appelle au maintien et la promotion d’une presse pluraliste, libre et indépendante en faveur de la préservation de la démocratie et du développement économique.
Le deuxième jour, était consacrée sur les règles applicables aux infractions liées aux libertés civiques avec SEKOU SISSOKO, Magistrat.
On retiendra le maintien du législateur malien dans le nouveau code pénal des infractions relatives à la diffusion de fausses nouvelles, à l’injure, à l’offense au Chef de l’Etat ou à un Chef d’Etat étranger ; l’offense est même élargie aux institutions constitutionnelles. L’infraction d’atteinte au crédit de l’Etat a particulièrement retenue l’attention compte tenu de son énoncé dans le nouveau Code pénal. On relèvera aussi que le législateur malien est très rigoureux vis à vis de ces infractions lorsqu’elles sont en lien avec sur la race, l’origine ou la religion.
Le rôle central du Pool cybercriminalité, ses compétences et attributions ont été largement discutés.
En groupe, les participants ont continué la réflexion sur les forces, les opportunités, les risques et menaces de l’espace civique au Mali.