ARTICLE 19 condamne fermement les récentes attaques terroristes contre des journalistes qui ont entraîné la mort de trois personnes et l’enlèvement d’une autre au Mali et au Burkina Faso.
Le meurtre de deux journalistes espagnols et d’un écologiste irlandais, ainsi que la disparition le 26 avril d’un Burkinabé dans l’Est du Burkina Faso est déplorable. Les deux journalistes travaillaient sur un documentaire anti-braconnage au moment de leur mort.
Le gouvernement du Burkina Faso doit immédiatement ouvrir une enquête indépendante, impartiale et crédible sur ces meurtres et disparitions, traduire les auteurs en justice et veiller à ce que toute la vérité sur ce tragique incident soit rendue publique.
Au Mali, Olivier Dubois, journaliste indépendant français et correspondant de plusieurs médias internationaux et locaux a été enlevé le 8 avril, mais cela n’a été rendu public que le 5 mai.
ARTICLE 19 appelle les autorités à faire tout ce qui est en leur pouvoir, conformément aux normes internationales humanitaires et aux principes des droits humains pour qu’Olivier Dubois rentre chez lui sain et sauf.
“Nous sommes profondément consternés et attristés par la mort des deux journalistes et l’enlèvement d’un autre, attaqués dans l’exercice de leur travail lors de deux incidents distincts en l’espace de quelques jours. Nous présentons nos sincères condoléances à toutes les familles des victimes. Nous appelons à des efforts conjoints pour enquêter sur ces cas, identifier et traduire les auteurs en justice et obtenir la libération du journaliste en captivité”, a déclaré Alfred Nkuru Bulakali, Directeur Régional Adjoint de ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest. Les journalistes et les activistes ont le droit d’exercer leur profession en toute sécurité, même dans les zones sensibles. L’assassinat des deux journalistes viole le droit à la vie, l’indépendance des médias et vise à priver le public du droit à l’information. Ces crimes lâches et abjects destinés à terroriser les journalistes et à leur inspirer la peur doivent être punis. Toutes les forces en présence dans la région du Sahel doivent maintenant montrer qu’elles ont tiré les leçons nécessaires et prendre les mesures appropriées pour renforcer la sûreté et la sécurité des journalistes et des médias dans le respect des normes des droits humains ».
Dans une courte vidéo rendue public aux premières heures du 5 mai, le journaliste Olivier Dubois a expliqué qu’il avait été enlevé à Gao, dans le nord du Mali, par le “Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans” (GSIM), un groupe terroriste. Le journaliste, dont on était sans nouvelles depuis le 8 avril, a été enlevé alors qu’il était en mission pour interviewer un commandant djihadiste local à Gao.
En France, pays dont Dubois est ressortissant, le parquet antiterroriste a ouvert une enquête préliminaire pour “enlèvement en bande organisée et en relation avec une entreprise terroriste”.
Le 26 avril, deux journalistes espagnols, David Beriáin, fondateur de la société de production 93 meters, spécialisée dans les programmes documentaires et factuels en milieu hostile et Roberto Fraile, cameraman, ainsi que Rory Young un ressortissant irlandais, Cofondateur et Chef Exécutif de l’organisation de protection de l’environnement Chengeta Wildlife, ont été tués après une attaque armée contre leur convoi dans la région de Fada N’Gournma-Pamala, dans l’Est du Burkina Faso. Un ressortissant burkinabé a également été porté disparu.
L’équipe faisait partie d’une patrouille de garde forestière anti-braconnage, accompagnée des soldats burkinabés, pour le tournage d’un documentaire sur le braconnage lorsque leur convoi est tombé dans une embuscade d’hommes armés non identifiés à bord de deux pick-up et de plusieurs motos qui ont ouvert le feu sur eux.
Le 27 avril, les forces de sécurité Burkinabè ont retrouvé les deux journalistes et l’activiste écologiste irlandais morts en brousse, les corps criblés de balles. Selon les sources de la société civile locale contactée par ARTICLE 19, la quatrième personne a recouvré sa liberté, mais les circonstances de sa libération ne sont pas encore clairement connues.
Selon des informations relayées par les médias internationaux, le Jnim, une coalition de groupes djihadistes affiliés à Al-Qaïda, aurait diffusé sur Internet un audio revendiquant l’exécution de l’attaque et affirmant qu’ils ne visaient pas nécessairement les journalistes. ARTICLE 19 n’est pas en mesure de confirmer l’authenticité de cet audio.
ARTICLE 19 exprime sa solidarité envers les journalistes et les médias qui travaillent dans des conditions de sécurité difficiles dans la région du Sahel et en appelle à une réponse coordonnée, inclusive et multisectorielle contre le terrorisme dans cette région, conformément aux normes internationales humanitaires et aux droits humains.
Une telle réponse doit prendre en compte le droit du public à l’information, et par conséquent accorder une attention particulière à la protection de la liberté d’expression, des médias, des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme.
Dans une déclaration conjointe à la suite de l’attaque au Burkina Faso, les gouvernements de la France, de l’Allemagne, de l’Italie et de l’Espagne ont réaffirmé leur engagement à poursuivre leur soutien aux opérations des forces de sécurité dans la région en ce qui concerne le respect des règles judiciaires et des droits de l’homme.
La délégation de l’Union Européenne au Burkina Faso a condamné les crimes en notant que “les terroristes sont des porte-drapeaux d’un obscurantisme qui annihile tout, incluant la liberté d’expression et le droit à la vérité“.
“Nous nous attendons maintenant à ce que les résultats des enquêtes soient rendus public, que les auteurs soient arrêtés et traduits en justice, que le journaliste en captivité soit libéré et que des mesures concrètes soient prises pour protéger la liberté d’expression, l’accès à l’information et les autres droits de l’homme et pour renforcer une gouvernance transparente ainsi que la démocratie dans la lutte contre le terrorisme au Sahel », a déclaré Alfred Bulakali.
Pour plus d’informations, veuille contacter :
Alfred Nkuru Bulakali, Directeur Régional Adjoint de ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest senegal@article19.org
Ou Eliane NYOBE, Assistante de Programmes Senior, ARTICLE 19 Sénégal/Afrique de l’Ouest eliane@article19.org
Tel: +221 77 553 13 87 ou +221 33 869 03 22